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La boite à outil pour comprendre le changement climatique

Nous allons aborder dans cette partie plusieurs éléments techniques dont il est important de comprendre les tenants et aboutissants. Certains relèvent de la physique pure, ils sont utiles à savoir, les autres plutôt de la statistique. Si vous êtes intéressé par le sujet du réchauffement climatique, ce qui est très probable vu votre décision de vous procurer cet ouvrage, vous aurez déjà entendu parler de certains de ces thèmes, sans peut-être, c’était mon cas il y a seulement 2 ou trois ans, comprendre exactement de quoi il retourne. Rassurez-vous, pas de complexités inutiles, pour la physique, quelques souvenirs de collège ou de lycée suffisent, pour les mathématiques, c’est la même chose.

 

Combien d’énergie utilisons-nous et d’où vient-elle ?

 

En moyenne, chaque habitant de la planète consomme en une année une quantité d’énergie de près de deux tonnes en équivalent pétrole. C’est l’équivalent de 64 pleins d’essence par an, soit plus d’un par semaine pour chaque habitant : pour une famille de 4 personnes, cinq pleins par semaine !

À quoi correspond ce chiffre ? C’est toute l’énergie que nous achetons d’une façon ou d’une autre, que ce soit pétrole, charbon, gaz ou même énergie renouvelable, et, plus important encore, sous quelque forme que ce soit. Ainsi, il inclut bien sûr l’essence ou le gazole dont nous remplissons nos réservoirs pour nous déplacer. Mais cette utilisation n’est que la partie visible de l’iceberg puisqu’en France par exemple, les carburants utilisés pour la voiture individuelle ne représentent qu’à peine 10 % de l’énergie totale consommée.

 

(…)

Les énergies fossiles, c’est quoi au juste ?

Beaucoup d’entre nous ont quelques vagues souvenirs des cours de chimie de l’école. Pas de panique, il ne faut guère plus que quelques connaissances acquises au lycée pour comprendre les enjeux de qualité de l’air et du climat. Rassemblons donc ensemble ces quelques souvenirs et tâchons d’éviter les complexités inutiles.

La matière est composée d’atomes, qui se combinent en molécules, qui elles-mêmes se combinent en beaucoup d’autres choses, dont des organismes vivants plus ou moins complexes. Le plus sophistiqué d’entre tous : l’homme.

Les atomes sont en général représentés par une lettre, par exemple C pour le carbone, O pour l’oxygène, H pour l’hydrogène, N pour l’azote. La formule des molécules, une combinaison d’atomes, contient plusieurs lettres, par exemple l’eau, H2O, qui indique qu’une molécule d’eau contient un atome d’oxygène pour deux atomes d’hydrogène.

Avec ces bases minimales de chimie, nous en savons bien assez pour comprendre les problèmes environnementaux relatifs à la qualité de l’air et au réchauffement climatique. Les énergies fossiles sont toutes composées entre autres d’atomes de carbone, d’hydrogène et d’azote. Ceci est bien normal puisqu’elles proviennent d’un long processus de décomposition de matières organiques, végétation et êtres vivants, essentiellement formés comme nous-mêmes de carbone, d’hydrogène, d’oxygène et d’azote.

 

(…)

Le charbon contient essentiellement des atomes de carbone, dont le pourcentage varie avec la pureté : brûler une tonne d’un charbon moyen produit autour de 3 tonnes de CO2.

En consommant un litre d’essence, un véhicule particulier émet 2,4 kg de CO2 et plus que son propre poids chaque année. Au bout de 10 ans, il faut donc imaginer 10 voitures empilées les unes sur les autres pour se faire une idée du poids du CO2 émis par la combustion liée à sa consommation d’essence. Ceci ne compte pas le CO2 émis à l’occasion de la production du pétrole, ni celui lié à sa transformation en essence ni les émissions liées à la production de la voiture ou à son entretien. Notons que ces chiffres peuvent varier du simple au double suivant les pays, en raison du kilométrage moyen réalisé et de la consommation par kilomètre.

Quand on brûle un kilo de gaz, on émet autour de 2,7 kg de CO2. Une maison équipée au gaz pour l’eau chaude, la cuisson et le chauffage va utiliser environ 1,3 tonne de gaz naturel et émettre 3,5 tonnes de CO2 chaque année. Il lui faudra environ 20 ans pour émettre autant de CO2 que son propre poids. Là encore, ces émissions ne comptent pas celles liées à la production du ciment et autres matériaux nécessaires à sa construction et entretien, pas plus que les émissions associées à l’électricité pour l’éclairage et les appareils ménagers.

Il est important de se garder un chiffre en mémoire, en gros trois tonnes de CO2 pour chaque tonne d’énergie fossile brûlée, car il illustre à quel point le phénomène de combustion dégage beaucoup, vraiment beaucoup de CO2[i].

 

Le CO2 est, nous l’avons vu, le principal gaz responsable du réchauffement climatique, mais en faibles quantités, moins de 0,5%, ce n’est pas un polluant, bien au contraire, il est nécessaire à la vie, celle des plantes en particulier.

 

(…)

Le problème est que tous les autres éléments contenus dans les énergies fossiles, le souffre et l’azote en particulier, vont aussi se combiner avec des atomes d’oxygène.

(…)

Ce n’est pas tout : la combustion de charbon émet aussi du plomb (42 tonnes aux États-Unis par an), du cadmium et de l’arsenic[ii]. Selon une étude américaine, la combustion du charbon est responsable de 42 % des émissions de mercure aux États-Unis, un métal lourd toxique qui peut endommager les systèmes nerveux, digestif et immunitaire, et constitue une menace sérieuse pour le développement de l'enfant.

 

La combustion s’accompagne aussi d’un autre phénomène : elle n’est jamais parfaite, que ce soit dans une centrale électrique au charbon, un moteur à essence ou une chaudière au gaz, surtout si ceux-ci utilisent des vieilles technologies, sont anciens et mal réglés. Mais au fait, une combustion imparfaite, c’est quoi ? C’est une combustion où toutes les particules ne se combinent pas avec de l’oxygène pour former des molécules stables, parfois parce que l’apport en oxygène n’est pas suffisant. Essentiellement, ces produits non désirés sont ce qu’on appelle des « (…)

 

Tout d’abord, la combustion d’énergies fossiles émet vraiment beaucoup de CO2 dans des proportions que nous avons du mal à réaliser car c’est sous la forme d’un gaz incolore et inodore. Si notre voiture ou notre chaudière au gaz produisait un déchet solide plutôt qu’un gaz, nous obligeant de temps à autre à aller vider un réservoir de résidus comme nous le faisons pour nos poubelles, notre prise de conscience serait plus facile. En effet, les déchets de notre voiture et ceux de notre chauffage représentent chacun plus de deux tonnes tonne par an et pour rappel, nos ordures ménagères ne pèsent que 354 kg en moyenne[iii] : en bref, nous passerions notre temps à vider le réservoir à déchets de la voiture ou de la chaudière !

 

Le CO2 n’est pas un polluant à faible dose, au contraire. La pollution due aux énergies fossiles est surtout liée à la combustion de toutes les impuretés qu’elles contiennent, souffre ou azote en particulier, mais aussi à la combustion imparfaite, accompagnée du rejet de particules fines ou autres produits polluants. Toutefois, depuis le début des années 70, plus encore depuis les années 90, les normes s’appliquant aux produits pétroliers ont été changées de telle sorte que la qualité de l’air s’est en fait fortement améliorée.

 

(…)

 

Cette situation crée une confusion dans l’esprit du public entre réchauffement climatique et pollution des villes. En Chine par exemple, l’amélioration de la qualité des produits pétroliers, le développement du parc de véhicules électriques et la fermeture ou le déplacement des centrales à charbon les plus polluantes ont permis, à partir de 2014, d’obtenir une très nette amélioration de la qualité de l’air dans certaines villes[iv]. Résultat, les études d’opinion montrent que les Chinois sont moins inquiets aujourd’hui qu’ils ne l’étaient en 2014 par les conséquences du réchauffement climatique alors que ce problème-là s’est aggravé et que la part de la Chine dans les émissions a continué de croître.

 

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Dans un système énergétique basé sur les énergies fossiles, près des deux-tiers de l’énergie consommée sont perdus en chaleur

 

Il y a trois façons de mesurer l’énergie consommée. La première, appelée consommation d’énergie primaire, est la plus élevée. En 2017, nous avons utilisé 14 milliards de tonnes en équivalent pétrole, donc un peu moins de deux tonnes par habitant. C’est toute l’énergie consommée, sous toutes les formes et en comptant les pertes[v].

Or plus de 30 % de cette énergie est utilisée pour… produire de l’énergie, particulièrement de l’électricité.

 

(…)

 

Pourquoi les énergies fossiles se sont-elles imposées comme la principale source d’énergie ?

 

Les énergies fossiles représentent 80% aujourd’hui de l’énergie que nous consommons, ce qui parait très élevé si l’on considère que d’une part ces énergies sont très polluantes et qu’en outre, le rendement est très faible. Pourquoi donc se sont-elles imposées comme la principale source d’énergie des sociétés modernes ?

 

Historiquement, c’est d’abord le charbon qui a émergé comme source d’énergie lors de la première révolution industrielle intervenue dès le milieu du XVIIIème siècle. On le sait, celle-ci est liée à la mise au point de la machine à vapeur qui allait entrainer un bouleversement complet des structures économiques et de la façon dont on pouvait à la fois produire et transporter les choses. Le développement des transports permettait aussi de rapprocher consommateurs et producteurs et d’offrir à ces derniers de nouveaux débouchés.

 

Avec la machine à vapeur, une vague massive de mécanisation dans l’industrie allait entrainer une hausse considérable de la productivité, et une forte baisse des prix relatifs, permettant le développement de la consommation de masse, des textiles notamment. C’était un progrès considérable si l’on considère que la seule force disponible pour les machines et la traction était celle des hommes et des chevaux (avec quelques les petites exceptions, moulins à eau et à vent).

 

(…)

 

Depuis que le pétrole est devenu l’une des principales sources d’énergie, autour des années 1930-1940, l’évolution de son prix a été erratique : s’il a été largement stable entre 15 et 20 $ le baril en prix d’aujourd’hui (le baril est l’unité de mesure dans ce métier, il correspond à 153 litres) jusqu’au milieu des années 1970, il a atteint un pic à plus de 100 $ au début des années 1980. Cette forte hausse enregistrée lors du choc pétrolier des années 1970-80 a entrainé une première transition énergétique dans les pays développés. Peu à peu, l’usage du pétrole s’est concentré dans les secteurs où il avait un avantage économique majeur, celui des transports et de la pétrochimie, tandis qu’il perdait des parts de marché au profit du nucléaire et du gaz naturel dans la production d’électricité ou le chauffage.

 

Puis le prix a entamé un long déclin, le point bas ayant été atteint en 1998, à moins de 20 $. Il a à nouveau très fortement progressé pour atteindre un nouveau pic à plus de 120 $ au début des années 2010. Depuis, le prix du pétrole a de nouveau fortement chuté, le fort ralentissement économique lié à la crise sanitaire du COVID ayant amplifié la tendance, puis il a nouveau fortement rebondi en 2021. Cependant, en raison des réserves mondiales relativement limitées, particulièrement celles ayant un coût d’exploitation faible, si nous ne trouvons pas un moyen de nous affranchir du pétrole, son prix augmentera inévitablement.

D’un point de vue statistique, on peut mesurer les émissions de plusieurs manières (et ce "détail" a son importance)

Vous avez peut-être lu quelque part que la France par exemple est un des pays qui émet le moins de CO2 (surtout à cause du nucléaire) par habitant…or, notre empreinte carbone par habitant est loin d’être aussi faible, nous rangeant plutôt parmi les mauvais élèves (mais pas les pires néanmoins). Comment expliquer cette différence ? Sommes-nous parmi les meilleurs ou les moins bons élèves ?

 

La réponse est simple, cela dépend de la façon dont on compte les émissions. Il existe deux méthodes qui chacune donne des résultats très différents, et le choix d’utiliser la première ou la deuxième n’est pas sans arrière-pensées politiques. Mais il y a d’autres petites subtilités dans le débat sur la responsabilité des différents pays du globe, chacun ayant tendance à utiliser la mesure qui l’avantage le plus.

 

Émissions de CO2 ou empreinte carbone ?

 

Premier problème, de quelles émissions parle-t-on exactement lorsque, par exemple nous disons qu’un Nord-Américain émet 20 tonnes de gaz à effet de serre, un Chinois 9 tonnes, un Européen 8 et un Indien 3 tonnes ? C’est assez simple car cela repose sur une méthodologie qui présente le gros avantage d’avoir été agréée internationalement : elle n’est donc pas l’objet de discussions méthodologiques sans fin, même si les données transmises par certains pays sont parfois sujettes à caution faute d’une transparence suffisante.

 

(…)

Émissions actuelles ou cumulées depuis le début de la révolution industrielle ?

 

Dans certains cas, les organismes qui suivent les émissions des différents pays comptent celles émises depuis le début de la révolution industrielle, plutôt que celles émises en 2020 par exemple ou depuis 1990. En effet, c’est depuis 1850 environ que l’envolée de la population et de la croissance économique a entraîné une forte croissance de l’utilisation de l’énergie, particulièrement du charbon, et que les émissions de CO2 ont vraiment décollé. Cette approche a du sens car le CO2 émis aujourd’hui reste environ une centaine d’années dans l’atmosphère : le CO2 émis par les centrales électriques européennes au milieu du XXe siècle pourrait être encore présent dans l’air, et agir autant que celui émis hier par notre véhicule.

Résultat, si l’on compare les émissions des pays additionnées depuis le début de la révolution industrielle, cela change un peu la donne. C’est le cas particulièrement pour la Chine : ce pays émet aujourd’hui plus de CO2 que les États-Unis et l’Europe combinés et est donc de loin la première macro-région/pays émetteur de la planète, plus d’un quart à lui seul. Par contre, si l’on tient compte de toutes les émissions depuis le début de la révolution industrielle, le poids de la Chine n’est que de 13 %, un quart seulement du poids combiné de l’Europe et des États-Unis, responsables à eux deux de près de la moitié de toutes les émissions[vi].

 

Cette mesure de la contribution historique est-elle utile ?

 

Elle l’est en partie et justifie en effet que les pays qui ont émis le plus et le plus tôt soient aujourd’hui leaders pour amorcer la direction opposée.

 

(…)

 

Les équations de Yaka

 

Les équations de Kaya ont été inventées en 1993 par l’économiste Japonais Yoichi Kaya[vii]. Elles permettent de comprendre de manière mathématique, donc non vraiment discutable, les facteurs qui influencent l’évolution des émissions de CO2 liées à la combustion d’énergies fossiles.

 

D’abord, rappelons un chiffre important : le CO2 ne représente qu’environ 72% des émissions de gaz à effet de serre. D’autre part, la combustion d’énergies fossiles, c’est 90% environ des émissions de CO2, le reste est essentiellement la production de ciment. Donc, on multiplie les deux chiffres et l’on aboutit à la conclusion que les émissions liées aux CO2, c’est 65% (72% multiplié par 90%), donc un peu moins des deux-tiers du problème.

 

Les équations de Yaka ne permettent de comprendre que cette seule composante, pas le tiers restant. Néanmoins, les deux-tiers, c’est déjà pas mal, et ce d’autant plus qu’elles nous permettent non seulement de comprendre le passé, mais aussi d’envisager des solutions pour le futur.

 

Voici le raisonnement sous-jacent aux équations de Yaka :

  1. Ce sont les êtres humains qui utilisent des énergies fossiles, la première variable est donc la population de chaque pays

  2. La consommation d’énergies fossiles dépend aussi du niveau d’activité économique. Donc, l’activité économique par habitant est un autre facteur

  3. Mais elle dépend aussi de l’intensité en énergie de l’activité économique, c’est-à-dire le montant d’énergie nécessaire pour l’activité économique.

  4. Enfin, les émissions dépendent de la nature de l’énergie utilisée. Si l’énergie est produite à partir de charbon, alors, les émissions vont être très importantes. Si elle est produite à partir de renouvelables (ou de nucléaire), cela va être très peu.

 

Examinons ensemble le schéma ci-dessous, il explique l’enchaînement des causes de manière simple et logique :

 

(…)

 

Le taux de carbone

Voyons enfin le 4e et dernier facteur, le niveau de CO2 par unité d’énergie utilisée. Là encore, c’est un ratio très simple, on divise le volume des émissions de CO2 par la consommation d’énergie. Il mesure de manière simple la teneur en CO2 de l’énergie utilisée : plus il est élevé, plus il traduit une utilisation intensive des énergies fortement émettrices de CO2 comme le charbon et une moindre utilisation d’énergies bas carbone, nucléaire ou renouvelables. C’est donc un indicateur de « propreté » de l’énergie utilisée, au moins du point de vue du CO2.

 

 (…)

Avec ces quelques concepts « simples », nous voilà maintenant mieux armés pour analyser les données disponibles et juger de la réelle performance des différentes régions et pays en matière d’émissions, mais aussi comprendre pourquoi les choses ne se sont guère améliorées depuis 1990, mais au contraire plutôt dégradées.

Par le passé, nous avons été capables de résoudre, en partie, des problèmes environnementaux, pourquoi pas celui du changement climatique ?

 

La situation environnementale ne s’est pas dégradée sur tous les fronts, contrairement à ce que l’on lit parfois, elle s’est même franchement améliorée sur certains. Nous avons vu que la qualité de l’air, en raison des pollutions industrielles et automobile, est en fait meilleure aujourd’hui qu’en 1985 dans les pays développés au moins. Pour les pluies acides, le trou dans la couche d’ozone, longtemps au centre des préoccupations internationales, les choses vont plutôt mieux et elles se sont améliorées assez rapidement. Lors d’une rencontre avec des techniciens du SIAPP, ceux-ci m’ont confirmé que la qualité de l’eau de la Seine est bien meilleure aujourd’hui qu’il y a 30 ans. C’est le cas en général pour la qualité de l’eau des lacs et rivières dans la plupart des pays développés. Tous ces résultats ont été obtenus grâce à d’importants moyens déployés en matière de recherche, une adaptation de la législation et, souvent, de lourds investissements.

 

(…)

Attention néanmoins, la situation environnementale dans ces mêmes pays s’est bien dégradée en général, on connait par exemple la situation désastreuse pour le plastique, celle des milieux marins, de certains espaces forestiers, mais le plus grave est peut-être sur la terre ferme : là, l’explosion démographique depuis 1990 (+50% de population) et l’enrichissement général a conduit à un bétonnage systématique des espaces naturels. Et là où Bill Gates[viii], dans son ouvrage, se réjouit avec gourmandise de cette évolution, et plus encore des énormes villes à venir, il y a tout lieu au contraire de s’en inquiéter pour une raison assez simple : l’espace sur terre n’est pas infini.

 

L’analyse de l’histoire des débats autour de la question du réchauffement climatique montre qu’ils se sont ouverts à la fin du xixe siècle. Le chimiste Suédois, Prix Nobel, Svante August Arrhenius, publie en 1898 le premier calcul relatif au réchauffement climatique lié aux activités humaines[ix]. Dans les années 1930, sur la base des relevés de températures effectués depuis le milieu du xixe siècle, le scientifique Canadien, Guy Stewart Callendar, affirme qu’un réchauffement climatique est en cours.


Plus d’un siècle s’est donc déjà écoulé entre la première étape et aujourd’hui, et pour autant, toutes les étapes n’ont pas encore été franchies. Il en existe, pour simplifier, 6, comme l’illustre le schéma ci-dessous.

 

(…)

Ennemi invisible

La première raison qui explique notre difficulté à agir est peut-être la plus simple d’entre elles : le CO2 et le méthane sont, par leur nature chimique, des ennemis invisibles. Le méthane est un polluant très dangereux, pour s’en convaincre il suffit de laisser sa gazinière ouverte, il est mortel au-delà de 5 % dans l’atmosphère, par inhalation ou explosion. Mais à l’état naturel, il est incolore et inodore, même si on le détecte au nez en raison d’impuretés qu’il contient ou d’additifs. Le CO2 quant à lui, n’est pas un polluant stricto sensu, surtout dans la proportion dans laquelle il est en moyenne dans l’atmosphère. Or les deux gaz sont contenus en très petites quantités dans l’atmosphère, moins de 0,05 % pour le CO2, c’est encore sensiblement moins pour le méthane, bien en dessous du niveau au-delà duquel ils deviennent directement dangereux pour notre santé, mais assez pour créer un effet de serre puissant.

 

(…)

Effets globaux, plutôt que locaux

 

Les effets des gaz à effet de serre sont globaux ; je conduis à Marseille ou Copenhague mais mes émissions impactent presque autant l’air de Pékin que de Houston, et vice versa. Ce n’est pas le cas des émissions qui affectent directement la qualité de l’air au niveau local : celles-là, surtout lors de situations climatiques particulières (absence de vent, fortes chaleurs, temps humide et froid), restent souvent bloquées près de là où elles sont émises et entraînent des fumées brunâtres, un air souvent irrespirable. Les gouvernements, sous la pression de leurs opinions publiques, sont donc bien plus engagés à agir et les mesures prises peuvent avoir des effets rapides.

 

(…)

 

Effets graduels, à long terme, non linéaires et différents selon les régions

 

Les effets du réchauffement climatique se mesurent à long terme, même si l’on enregistre une nette accélération depuis une vingtaine d’années. La hausse des températures n’est pas linéaire : des années chaudes succèdent aux années plus froides. En revanche, les années les plus chaudes, depuis que l’on peut mesurer les températures, sont beaucoup plus nombreuses depuis 1980, et depuis cette date, chaque décennie est plus chaude que la précédente en moyenne.

 

(…)

Puissance des lobbys producteurs

 

Le réchauffement climatique impose que nous réduisions fortement l’usage d’énergies fossiles. Ceci veut dire qu’il n’est pas dans l’intérêt des lobbys des industries pétrolières, gazières et charbonnières mais aussi celui de l’automobile ou d’autres secteurs particulièrement exposés, à de mettre en œuvre des solutions ou promouvoir des options qui les pénalisent. Au contraire, leurs actions vont du financement d’études alimentant le doute sur la réalité du réchauffement climatique et son lien avec des activités humaines, à la promotion d’options stratégiques non viables à court et moyen terme, en passant par du lobbying auprès des élus des régions les plus menacées en termes d’emplois.  La mise en avant de solutions miracle a toujours le même objectif : éviter de déployer celles des technologies dont on sait qu’elles fonctionnent et retarder la transition énergétique.

 

(…)

 

Implications économiques lourdes

 

Apporter une solution à un problème environnemental implique des investissements d’un volume variable et dans certains cas peut entraîner un renchérissement du coût de production de certains biens. Dans le passé, de nouveaux développements technologiques et la production en masse de nouvelles technologies ont généralement permis de limiter le coût pour le consommateur à un niveau bien plus bas que ce qui avait été initialement envisagé (ce sans même compter les économies réalisées en termes de santé par exemple).

 

(…)

La résolution du problème dépend aussi de nos comportements personnels

Dans tous les cas que nous venons de mentionner, les solutions au problème dépendaient assez peu de nos comportements individuels, au moins de manière directe. Certes, les réactions des opinions publiques ont contribué à obliger les parties concernées à trouver des solutions. Mais dans le cas des marées noires, celui de la pollution des villes, des pluies acides ou du trou dans la couche d’ozone, les actions individuelles comptaient peu : que pouvions-nous par exemple faire à titre individuel ? Très peu.

(…)

Manque de leadership des grandes puissances économiques, particulièrement les États-Unis

Cet élément est important, surtout si l’on considère le rôle presque toujours essentiel joué par les États-Unis sur les questions environnementales des années 1960 aux années 1990, le pays ayant, par son poids économique et géopolitique, un effet d’entrainement sur les autres régions.

(…)

[i] Pour comparer l’intensité en émissions de gaz à effet de serre des différentes énergies fossiles, il faut aussi tenir compte du fait que brûler un kilo de charbon, de pétrole ou de gaz naturel ne dégage pas la même énergie. On calcule donc souvent les émissions par kWh produit pour rendre les choses comparables. Selon cette mesure, c’est le gaz qui est le plus propre. Pour chaque calorie générée, les produits pétroliers entraînent 30 % d’émissions en CO2 de plus, et le charbon, presque le double.

[ii] Coal and Air Pollution, Union of Concerned Scientists

[iii] Source ADEME. Ces données ne comptent que les ordures ménagères, autrement dit le poids moyen de nos poubelles. Le poids total des déchets solides par habitant, y-compris ceux de l’industrie et du BTP atteignent le chiffre vertigineux de 13,8 tonnes

[iv] La pollution des centrales à charbon qui affectait la qualité de l’air de Pékin au point de le rendre irrespirable a été en fortement réduite en fermant les centrales et usines les plus polluantes, mais surtout en transférant certaines activités dans d’autres villes qui sont à leur tour devenues très polluées.

[v] Les pertes d’énergie dans les centrales nucléaires ne sont pas comptabilisées dans ce total.

[vi] Source : OWID, basé sur les données CDIAC et Global Carbon Project, cité par « Our World in Data ». Europe, EU27, plus Suisse et Norvège.

[vii] Source : Wikipedia, équations de Yaka

[viii] Ouvrage déjà cité

[ix] Le Canard Enchainé, dans son édition du 27 Octobre 2021 établit une chronologie complète de l’histoire de la compréhension du réchauffement climatique. Le célèbre Palmipède, toujours très rigoureux dans les faits qu’il rapporte, précise que c’est le Français Jacques Fournier qui en 1824

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